Une fête s’organise quelque part

Le transgressif est une petite ligne de démarcation que l’on s’offre, où quelques mots échangés suffisent, imaginant qu’un lien se forme à ce moment-là, préféré à ce qui relèverait du calcul, d’une soumission que l’on imposerait à un être qu’avant tout nous aimons. La pensée est différente, sans calcul, car il s’agit de se laisser conduire, d’abord dans un cadre prédéfini, puis il y a toujours cet après, où la sensibilité n’a plus rien de prévu, à part, peut-être, une vague idée de ce que pourrait être une fin. De toute façon, il y en aura une, aujourd’hui, comme les autres fois, dictée parfois par des éléments simples de la vie quotidienne. Il suffirait d’un rendez-vous, de n’avoir plus le temps, ou que les chemins se séparent, de fait, parce que la destination est atteinte. Cependant, il s’est créé un évènement particulier, unique. Nous serions si peu à pouvoir l’évoquer qu’il faudrait à nouveau se réunir, et provoquer le souvenir de ces quelques minutes. Après tout, ce n’était pas grand chose sur l’échelle de toutes les vies, et pourtant, une loi s’est établie, dans l’oralité. C’est elle qui mobilise une pulsion particulière, d’avoir envie de la faire durer, comme un bilan de journée, mais nous sommes si peu attachés à la véridiction qu’il ne sera pas utile de chercher dans l’entourage ce qui pourrait avoir mené à de telles conclusions. Un souvenir très ancien pourrait l’avoir déclenché. Un désir, aussi. Ce qui compte, c’est qu’il continue d’exister sous cette forme, qu’en soi, nous n’ayons pas envie de nous en dessaisir. C’était si beau. C’est là la sève d’un roman tout entier. Tout ce qui se construit en amont. Tout ce que cela aura comme conséquences des jours durant. Pour une seule phrase à laquelle aura répondu un regard.

Un rendez-vous avec le mystère. 

Les personnes que nous voulions atteindre par notre sensibilité ne sont pas celles qui nous apparaissent comme incontournables au tout début d’une histoire. On se dit, tient, voilà le personnage principal. Et puis tout est détourné. On a tout de même besoin de saisir quelque chose. On pose tout. On regarde au loin. On ne sait pas trop combien de temps on a mis. Finalement, ce n’était pas si long. Il fallait dépasser les premières barrières, aller plus loin malgré le panneau stop. Des chiffres, des tableaux, des dates, des comptes-rendus de réunion. Tout ce qu’il faut concevoir comme un plan.

Après cela, une énergie se concentre. C’est elle qui écrit. Elle choisit sa voie, elle circule comme de l’eau dans la terre, elle irrigue toutes nos racines.

Les saisons passent, le soleil fait son œuvre, la lune aussi, et tout fleurit. On n’a plus qu’à cueillir. C’est un printemps poétique toute l’année.