Les mots que nous lisons, nous les transformons pour les adopter, les assimiler. Ils font alors sens dans notre esprit. Reformulés, réintégrés à d’autres flux, criés, oubliés, ils traduisent notre état de conscience d’une globalité éphémère et incomplète.
Ainsi, quand nous apprenons l’arrêt d’un processus de solidarité consistant à verser aux plus pauvres institutions publiques l’argent des plus riches, on ne se demande plus qui a bien pu faire pression au sommet des hauteurs, car on s’imagine assez mal le pauvre, dans un bureau, réclamant que cette disposition prenne fin à coup d’humbles “oh, non, je vous en prie, je n’en ferai rien”.
La multiplication des anathèmes et des invectives, nous dit-on, constitue encore un obstacle pour admettre, sans peur de tout perdre, d’équilibrer l’économie d’un système, mais les économistes ne sont pas contents que l’argent public ne serve pas QUE l’économie, alors, c’est une pluie de bilans se suivant et se ressemblant tous, catastrophiques et alarmants, la célèbre crise du budget, le problème de tous, géré par quelques-uns.
Nous pourrions lutter contre cet horizon sans fin de la précarité. 36% de la population déclarent avoir des difficultés pour payer “certains” actes médicaux. 64% des nouveaux pauvres avouent qu’ils ne peuvent plus y faire face. On peine à trouver un toit dans la société la plus riche du monde. On entre dans une ère d’inégalité sidérale, spirale générale de déclassement et on oublie savamment d’étudier ce que provoque la régulation des frais sociaux, l’impact d’une mesure sur la population quand elle se traduit juste par un remerciement ou par la légitime prolongation d’une vie.
Des milliers de tués en moins de six mois.
C’est une purge. Un carnage.
Alors, nous transformons la majorité sociale en majorité politique en disant la vérité, crûment.
Nous ne pensons pas que l’opinion aurait peur de l’autre, qu’elle aurait peur d’aider.
Car l’opinion ne fait rien d’autre, selon nous, que se former.