Le faisceau conflictuel des narrations qui nous gouvernent

Voilà bientôt un an que les décisions que nous avons prises ensemble ont libéré les voies qui empêchaient la pensée de circuler.

Comme nous l’avions annoncé, des élections se sont tenues afin de préparer une nouvelle année de conquête vers les territoires inexploités d’un vivre ensemble respectueux des identités, des pluralités et des articulations permettant à l’éthique de non-exclusion que nous avons formulée de s’inscrire dans la nécessité.

Nombreux sont ceux qui ont participé à l’élaboration de notre nouveau système. Les résultats des travaux réalisés au sein de nos instances de veille démocratique nous ont permis de dresser un premier constat :

Qu’il n’existe pas de dictature en soi ; qu’aucun être humain ne naît génétiquement programmé à devenir dictateur, monstre, ou criminel ; qu’un ensemble complexe d’histoires collectives, d’anciens trônant, d’angoisses ancestrales, d’espoirs fantômes, nourrit la volonté d’une incarnation de la puissance, garantissant à un corps social se sentant malade, réclamant un cadre soignant, des lois simples qui pervertissent sa maladie au point qu’elle se fasse oublier.

Le danger dans ce jeu de puissance est qu’il stigmatise le fort et le faible, celui qui peut et celui qui ne peut plus, formant inéluctablement un couple mortifère composé de celui qui veut et de celui qui ne veut plus, de celui qui a les droits et de celui qui n’en a plus.

Les dérives, nous les connaissons, ne conduisent qu’au conflit, au meurtre, au suicide.

Ce serait croire en l’irréversibilité — et donc, en l’éternité —, que d’imaginer que des consciences à toujours endormies dans la pleine satisfaction de ne plus pouvoir, de ne plus vouloir ou de n’avoir plus le droit que de respecter les lois qu’on lui impose, ne puissent se laisser gagner par le retour d’un désir individuel d’à nouveau profiter des vies qui se savent essentielles dans l’absolu.

Le dictateur, comme la dictature qui l’autorise, est sollicité. L’oppresseur et l’opprimé se lient par un contrat. Le criminel et la victime ne font plus qu’un.

Nous avons tenté d’inspecter le corps social tout entier afin de déceler les quelques paramètres que nous supposions pouvoir nous prévenir des éventuels dangers que provoquerait une autorité excessive, miroir funèbre d’une faiblesse inquiétante.

La supposition théorique s’est vue confirmée en pratique. Dans presque tous les partis, et donc, par extension, dans presque tous les corps constituants de notre société, nous avons relevé la présence de germes favorisant le développement d’une volonté incompatible avec le jardin pacifique que nous souhaitons cultiver idéalement.

Paradoxe de l’être fait chair, de la pensée faite corps, les conséquences de l’infiniment petit sur l’infiniment grand restent à prévenir et c’est dans cette perspective que s’inscrit déjà le fonctionnement que nous connaîtrons à partir de janvier 2017.

Être plus puissant qu’un autre n’aura, à quelque échelon que ce soit, plus aucune importance. Ce qui comptera, prioritairement, ce sont les moyens qui seront donnés à chacun d’intervenir dans le fonctionnement interne du milieu encore trouble dans lequel il cherche à établir sa demeure afin qu’il soit loisible d’écrire son propre script dans le faisceau conflictuel des narrations qui nous gouvernent.

Dans le cœur de la vie

“La poésie des textes permet à chacun d’approcher d’un peu plus près la vérité des arguments dans le débat politique qui anime toute société”.

Voilà qui est bien dit.

Il y aurait un théâtre de l’intranquillité, apaisé dès lors que le propos entre en fiction. Il suffirait d’écrire, ou qu’un autre écrive, d’expliquer ce qui s’est passé, simplement, en décrivant les faits.

— Mais ce serait du journalisme, crie la foule désespérée devant l’inconsistance de l’intrigue.

Non, car le journaliste écrit dans un journal.
Le poète, dans un poème.

Une vieille dame s’occupe d’arbres qu’elle a placés sur le rebord de sa fenêtre. Elle regarde ainsi passer les gens, essentiellement des voisins. Elle remarque juste leur présence. Elle leur sourit quand ils la saluent. Parfois, elle perd ses clés et vient frapper chez la gardienne en dehors des heures renseignés sur l’écriteau de la loge, mais la vieille dame ne connaît pas ces règles. Elle, elle a perdu ses clés. Elle erre dans la cage d’escalier depuis plusieurs heures. Elle pense à ses arbres, se demande qui va s’en occuper si elle ne peut plus rentrer. Ils ont besoin qu’on leur parle, qu’on vérifie s’ils ont assez d’eau, s’ils ont assez de place.

— C’est consternant. Il n’y a pas d’intrigue.

Et pourtant, l’intrigue est bien là.
Des arbres, sur un rebord de fenêtre.

On pourrait dire que la vieille dame n’a plus toute sa tête. On pourrait l’enfermer, même. Elle est dangereuse. Elle pourrait ouvrir le gaz et faire sauter tout l’immeuble. Les voisins se demandent si elle a encore une famille.

— Contactons-la !

Voilà l’intrigue.

La vieille dame perd ses clés, mais elle s’occupe comme personne des arbres qu’elle a élevés. Quand ils n’ont plus assez de place, elle les emporte et les plante dans la forêt. Ils sont calmes. Ils sont doux. Ils prennent leur place et se développent. Ils transmettent ce qu’ils ont appris de la vieille dame. Les promeneurs se laissent gagner par leur quiétude. Les arbres continuent de vivre leur vie d’arbre. Ils déploient leurs racines. Ils aident les autres arbres. Ils ne savent peut-être rien de la vieille dame, mais ils sont là, agissant, dans le cœur de la vie.

L’opinion ne fait rien d’autre que se former

Les mots que nous lisons, nous les transformons pour les adopter, les assimiler. Ils font alors sens dans notre esprit. Reformulés, réintégrés à d’autres flux, criés, oubliés, ils traduisent notre état de conscience d’une globalité éphémère et incomplète.

Ainsi, quand nous apprenons l’arrêt d’un processus de solidarité consistant à verser aux plus pauvres institutions publiques l’argent des plus riches, on ne se demande plus qui a bien pu faire pression au sommet des hauteurs, car on s’imagine assez mal le pauvre, dans un bureau, réclamant que cette disposition prenne fin à coup d’humbles “oh, non, je vous en prie, je n’en ferai rien”.

La multiplication des anathèmes et des invectives, nous dit-on, constitue encore un obstacle pour admettre, sans peur de tout perdre, d’équilibrer l’économie d’un système, mais les économistes ne sont pas contents que l’argent public ne serve pas QUE l’économie, alors, c’est une pluie de bilans se suivant et se ressemblant tous, catastrophiques et alarmants, la célèbre crise du budget, le problème de tous, géré par quelques-uns.

Nous pourrions lutter contre cet horizon sans fin de la précarité. 36% de la population déclarent avoir des difficultés pour payer “certains” actes médicaux. 64% des nouveaux pauvres avouent qu’ils ne peuvent plus y faire face. On peine à trouver un toit dans la société la plus riche du monde. On entre dans une ère d’inégalité sidérale, spirale générale de déclassement et on oublie savamment d’étudier ce que provoque la régulation des frais sociaux, l’impact d’une mesure sur la population quand elle se traduit juste par un remerciement ou par la légitime prolongation d’une vie.

Des milliers de tués en moins de six mois.
C’est une purge. Un carnage.

Alors, nous transformons la majorité sociale en majorité politique en disant la vérité, crûment.
Nous ne pensons pas que l’opinion aurait peur de l’autre, qu’elle aurait peur d’aider.

Car l’opinion ne fait rien d’autre, selon nous, que se former.

Mouhahaha !

On se souviendra longtemps de la grande réunion de service qui s’est tenue la semaine dernière au siège de l’une des toutes dernières dictatures du système, encore en exercice.

Tout le monde était heureux de se retrouver après une longue trêve estivale. La direction offrait le café et chacun devait se charger d’apporter quelque chose à manger, alors chacun y est allé de son petit paquet de chouquettes, de son petit paquet de croissants, de son petit paquet de pains au chocolat, en prévoyant, à la louche, sa propre consommation et celle d’au moins dix collègues. Et donc, dix, multipliés par autant de dix qu’il n’y a de collègues dans une vie, on aurait pu ouvrir une boulangerie avec les fruits de la générosité du personnel alors que la direction, elle, n’a fait que couler une cafetière que personne n’a touchée parce que, le café, c’est comme le bon vin, ça n’a pas le même goût dans des verres en plastique, qu’on se brûle avant de boire une boisson qui se refroidira en quelques minutes et que, c’est bien connu, on a pris le café le moins cher par souci de faire faire des économies au service public, autant dire une substance non comestible.

– Mouhahaha !

Bilan et perspectives : tout va bien.

— Vous n’êtes pas sans savoir qu’il y a des travaux dans le centre de formation. Tout devait être livré avant la fin de l’été, mais, hihihi… (Pardon, j’en ris d’avance)… enfin, vous savez, nous sommes aussi sur un site classé et donc, au milieu du terrain, il y a un arbre… classé.
— Pffffff… Non ?
— Hihihi… et bien si… ils n’y avaient pas pensé, et l’architecte n’y avait pas pensé non plus, mais il a fait une deuxième proposition qui est passée comme une lettre à la poste, mais, hihihi, pardon, Mouhahaha !, (Les larmes me coulent), il n’avait pas pensé qu’un arbre, ça avait des racines !
— MOUHAHAHA !
— L’architecte, il est viré !
— MOUHAHAHA !
— Et les travaux sont reportés d’au moins quatre ans parce qu’il faut tout recommencer, les appels d’offre et tout et tout.
— MOUHAHAHA !
— Alors, vous imaginez bien que les parents ne sont pas contents que le centre de formation soit un chantier permanent.
— Oh ben, et comment !
— Du coup, ils n’inscrivent plus leurs enfants et on ferme déjà une première classe qui, forcément, entraînera la fermeture d’une autre classe, puis d’une autre, puis d’une autre, puis d’une autre, tout ça pendant au moins cinq ou six ans.
— MOUHAHAHA !

Les rires s’échangent dans toute l’assemblée. On se dit “ça alors, il a un don pour raconter”. On s’essuie le coin des lèvres en avalant la dernière bouchée de son propre croissant.

— Autre nouvelle importante : avec les événements récents, le conseil de sécurité a décidé qu’on entrerait dans notre bâtiment avec un badge nominatif.
— MOUHAHAHA ! C’est pire qu’une pointeuse.
— Oh, on sait comment ça marche ici et on connaît bien le vieil adage : “Vous arrivez comme des artistes et vous partez comme des fonctionnaires”.
— MOUHAHAHA !
— De toute façon, c’est une mesure décrétée au niveau le plus haut. Nous n’avons pas le choix. Vous n’avez pas le choix. Et c’est pour votre sécurité.
— Et sur les autres sites, comment ça se passe ?
— Sur les autres sites, il n’y aura pas de badge.
— On aura le droit de se faire trucider. MOUHAHAHA !
— Vous savez, la décision, elle, est prise au plus haut, oui, mais en bas, chacun fait ce qu’il veut de son application. Là-bas, c’est comme ci. Ici, c’est comme ça. Et puis… Pffffff… (Pardon, mais mieux vaut en rire)… Si quelqu’un veut entrer, c’est pas une porte à badge qui l’arrêtera. Vous avez vu l’état des fenêtres ?
— MOUHAHAHA !

On rit du terrorisme comme de l’architecte viré, comme des classes fermées, comme de l’absence de perspectives à long terme, comme du paradoxe des justifications apportées. Au fond, on raconte à ceux qui ne faisaient pas attention. Un brouhaha s’installe. On s’échange aussi les photos de vacances.

— Et sinon, je vous ai préparé une proposition pour la composition du nouveau conseil des sages, tous nommés.
— Comment fonctionnera-t-il ?
— On ne sait pas.
— À quelle cadence se réunira-t-il ?
— On ne sait pas.
— Et le “pôle administratif”, c’est nouveau ?
— Ah, justement, à ce propos. En vrac : On ne veut plus, là-haut, permettre le cumul d’emploi pour compléter un temps non complet. Toutes les candidatures ont été refusées et… Pffffff… (Je ne devrais pas vous le dire)… je crois qu’on est face à quelques bras cassés et que ça devient compliqué de gérer la singularité de chacun. Donc, attendez-vous à une vague de “c’est pareil pour tout le monde”.
— MOUHAHAHA ! Quelle bande de bras cassés !
— Et aussi, autant vous prévenir : Les personnes en congé maternité ne seront plus remplacées. Il faudra se débrouiller sans.
— MOUHAHAHA ! On n’aura qu’à rappeler l’architecte !
— (Ça marche) Je vous conseille donc de bien faire attention le soir de noël, et si l’été s’est bien passé de votre côté, merci d’avance pour les collègues : faites-vous avorter !
— MOUHAHAHA !

La direction est tout sourire. On se tape dans le dos. On se raconte les vacances en testant la chouquette du voisin. Certains quittent l’assemblée, désabusés.

Des milliers dans nos cœurs

C’est nouveau, il faut maintenant que je réponde à des messages reçus sur mon adresse électronique personnelle, que j’utilise mon téléphone personnel pour organiser ma vie professionnelle, que je vienne à des réunions en dehors de mon temps de travail, bref, que je donne un peu plus encore alors que je suis déjà au taquet toute l’année.

Les réformes en tout genre m’ont obligé à acheter un ordinateur. En trois mois, il n’y a plus rien qui marche parce que ce n’est plus à jour. Alors, je ne suis pas du genre syndiquée, mais avant de “renouveler mon matériel informatique”, j’ai calculé.

Oui, depuis quelques années déjà, je suis obligée de calculer, de calculer, de recalculer, et finalement d’admettre que je vais devoir faire des choix, parce que, voilà, je n’ai bientôt plus les moyens de vivre, et je remarque peu à peu que la case “dépenses” gonfle, alors que pour la case “recettes”, j’ai juste besoin d’un copié/collé (j’ai fait une formation).

Augmentation ? Refusée.
Changement d’échelon ? Refusé.
Progression de carrière ? Mouhahaha.
Motif des refus et des rires ? Économique.

L’économie ? C’est ce, justement, à quoi je participe en payant chaque année de plus en plus cher ?
Jamais l’économie se souvient qu’elle doit remplir un peu les caisses de ceux qui consomment ?
Ou bien il y aurait bientôt ceux qui consomment et ceux qui ne consomment pas ?
Ou qui consomment de moins en moins ?
Ou qui ne consomment plus ?

L’abonnement mensuel pour les transports dits publics a augmenté discrètement de quelques euros. La baguette, le café, quelques centimes. Les énergies diverses et variées, on ne sait pas trop parce que le contrat, le nom, les taux de je ne sais quoi, tout change tous les deux mois. La moindre fringue est maintenant à trois chiffres et ça dure deux lavages ou trois balades. Faut manger bio, sinon, on s’empoisonne. Plus de disques neufs. Plus de livres neufs. Je suis passée des retraits à 40 EUR aux retraits à 20 EUR. Plus de restos. Des pâtes sans goût. Plus qu’un repas par jour. Bientôt comme les mendiants que je croise à longueur de journées, tellement désespérés (un à chaque station, un à chaque coin de rue, des dizaines dans les gares, des milliers dans nos cœurs) qu’ils en deviennent agressifs. Si je ne leur donne rien, c’est moi qu’ils accusent en me rappelant que je dors tous les soirs dans un lit, et je rentre la faim et la culpabilité au ventre.

Épargne : 0,75% sur une année.
Et mon salaire qui n’a pas changé depuis plus de dix ans.

Alors, vous savez quoi ?
En dehors de mes heures de travail, il ne faudra plus compter sur moi.
Et au moindre rhume, je me ferai arrêter.

La menace virtuelle

Ce qui fait chaque jour la une de l’actualité n’est pas sans rappeler les innombrables chapitres qui s’écrivent dans l’invisibilité du lien social.

Des guerres se perpétuent, des catastrophes s’enchaînent, des crises s’inventent, des coups de projecteur s’offrent, presque sans raison apparente, à la banalité d’une vie ou d’une opinion singulière, la violence d’un discours, l’arrogance, sans pitié, le constat permanent d’une insultante inégalité. On place à la tête des institutions des hommes de main poursuivis pour détournements de fonds. Les opposants politiques : au placard. On ferme peu à peu les lieux où les citoyens peuvent débattre. On coupe les vivres à la création. Il y aura bientôt un droit autoritaire de dicter la conscience.

L’aspect abstrait d’une pensée collective n’empêche pas l’existence réelle, concrète, d’une pensée individuelle qui, elle, est riche d’être activée dans un seul et même corps, se sentant à la fois être unique, délimité par le début et la fin d’une seule vie, composante d’un flux permanent, en constante évolution, et participer à la constitution d’un tout social, que l’on voudrait solidaire et pacifique.

Il y aurait une menace, déjà incarnée ailleurs, des exemples aboutis d’un système globalement perverti, tellement éloignée dans l’espace ou dans le temps, qu’elle ne servirait d’exemple à ne pas suivre que pour figer l’opinion sur une seule voie possible, l’empêcher de s’exprimer, alertant que tout pourrait s’effondrer sous un mode “on vous aura prévenus” avant l’heure, alors que la menace qui nous intéresse est une menace virtuelle. C’est celle qui se construit dans le silence. Ce serait croire qu’il ne se passe rien quand rien n’est officiellement communiqué, mais nous connaissons les outils de ceux qui organisent la riposte, à l’abri des regards indiscrets. Nous sommes en pleine campagne électorale. Nous sommes en plein débat d’idées. Analysons ce qui s’est fait, ce qui s’est produit, et supposons ce qui se projette.

Juge au-dessus du juge. Entièreté et entité. Devoir et liberté.
À part à attiser la haine des uns contre les autres, à alimenter un climat de guerre civile, à quoi pourrait bien servir la critique de l’extrême droite dans un journal d’extrême gauche et vice versa ?

Il s’agira de ne plus se tromper de public.

Notre sujet, c’est ce qui se passe en ce moment, ici, parmi nous.
Notre sujet, c’est notre société.

[CP] – Nouvelle organisation

Le CP s’est réuni afin de dresser un premier bilan après six mois d’existence de notre nouveau système.

Il se félicite que les outils d’analyse dont notre société s’est dotée permettent, comme il l’avait été supposé, de mieux orienter les prises de décision collégiale.

Afin que le critère économique ne soit plus le seul à être pris en compte lors de nos prochaines évaluations, nous créons le critère démocratique et le critère artistique.

Deux questions simples ont été posées aux directions de chaque parti :

1. Votre système permet-il à l’ensemble des membres ou de leur(s) représentant(s) d’intervenir sur l’organisation structurelle de votre parti ?
2. Est-il offert aux membres de votre parti un espace de liberté personnel où le développement d’un choix autonome est légalement garanti ?

Après étude de l’ensemble des réponses, il apparaît que, dans certains partis :
1. la liberté des membres est saine et la structure peut être modifiée selon le choix du plus grand nombre ;
2. la liberté des membres est saine, mais la structure ne peut pas être modifiée selon le choix du plus grand nombre ;
3. la liberté des membres est trop fortement circonscrite et la structure ne peut pas être modifiée selon le choix du plus grand nombre.

Ainsi, nous observons trois tendances qui reclassent les partis jusqu’ici autodéterminés :
1. Autogestion du système.
2. Gestion conservatrice du système, avec forte concentration du pouvoir.
3. Dictatures (ou pouvoir absolu).

Et dégageons trois orientations fondamentales : la transmission, la formation et la création.

Comme une pluie torrentielle de cauchemars

Je me suis toujours donnée entièrement à mon travail.

Sans lui, je ne serais sans doute rien. Il y a encore quelque temps, je pensais encore qu’il m’avait tout apporté. C’était comme si on m’avait donné le droit de mieux exister. J’étais prête, autant d’années que la loi me le permettrait, à repousser le jour où je saluerai tous mes collègues une ultime fois, mais depuis peu, je ne sais pas trop pourquoi, je fatigue. Je sens comme une menace qui se rapproche. J’entends qu’on parle dans les couloirs, qu’on entre sans prévenir, qu’on se moque lorsqu’on s’adresse à moi, qu’on ne me répond plus qu’avec des énigmes de plus en plus complexes à déchiffrer.

Il y a sans doute plus grand malheur que le mien, mais chaque nuit, dans ma tête, mon esprit s’emballe et se laisse envahir comme si une pluie torrentielle de cauchemars tentait de l’emporter. Je ne dors plus. J’arrive quand j’ai réussi à sortir de chez moi, alors, forcément, je rentre tard, car je dois finir ce que l’on me demande de faire. Enfin, je crois. J’ai l’impression qu’on me demande de tout faire. Je ne sais pas ce qui a changé. Tout devient de plus en plus difficile à comprendre, à atteindre, à supporter.

Je ne demande pas que l’on me plaigne.
Juste un peu de calme.
Un peu de temps.
Pour essayer de comprendre.
Pour me reposer, aussi.

Où le besoin d’une transcendance de la violence s’est vu naître

Fabriquer un livre.
Le livre.
Le dernier espéré,
Ou le premier désiré.
Pour réunir l’œuvre d’un seul personnage monstrueux,
À la fois criminel et victime,
Parce qu’il n’y a plus qu’un seul personnage.
Notre société.
Empêchée de projeter son passé, ne pouvant plus se projeter dans l’avenir.
Incertain.
Aussi, nous écrirons.
Au passé.
Pour lui demander où se situe l’erreur commise.
Où le besoin d’une transcendance de la violence.
Contenue.
S’est vu naître.

Création d’un secteur littéraire

Constatant que nos services publics tendent à privilégier des formes autoritaires d’exercice du pouvoir conduisant peu à peu à la fascisation de l’esprit et considérant que de nombreux espaces de liberté d’expression ont été supprimés, la Présidence, afin de maintenir l’énergie d’un courant démocratique entre nos citoyens, décide l’ouverture d’un secteur littéraire qui sera en charge de mettre à la disposition du public autant d’outils artistiques qu’il sera possible d’en produire pour que cette tendance soit freinée, neutralisée et, nous l’espérons, renversée.

Notre peuple exprime sourdement le besoin d’établir d’autres modes de fonctionnement du système, aussi, le critère économique ne sera désormais plus le seul critère pris en compte tout au long des débats qui s’ouvriront en septembre prochain lors du renouvellement de notre assemblée.

Souhaitons que les partis en présence entendront que leur action ne garantit pas, actuellement, que la Dictature ne reprenne pas la place d’où elle a été si récemment expulsée. Aussi, nous rappelons aux instances actives, adhérents et directions, qu’il est encore temps de se prémunir et nous les invitons à faire en sorte, à l’instar de ce que nous avons créé ensemble, que les instances dirigeantes et représentatives redeviennent collégiales.