Tout se serait passé différemment si nous en avions parlé en amont

Une fin de la réunion, ce n’est pas très compliqué, parce c’est toujours un peu pareil. Tout le monde est fatigué. Il y en a trois ou quatre qui sont partis parce qu’ils avaient soi-disant un rendez-vous. Les sujets les plus épineux sont venus en dernière partie, le temps que les langues se délient, et puis ce n’était pas prévu, on n’a plus le temps, on en parlera la prochaine fois, et le directeur s’en va, et la coordinatrice le suit, et les agents se dispersent à différentes vitesses, et certains restent sur le trottoir, fumant peut-être une cigarette, ou semblant juste attendre, comme ce que j’ai appris à faire. En fait, je l’ai toujours fait mais j’ai appris à mieux le faire. J’arrive toujours avant tout le monde pour voir ce qui se passe juste avant, puis je reste pour écouter, rencontrer, poser aussi une parole. Forcément, avec ce qui venait de se passer, on avait besoin de partager un peu. On fait tous une sorte de bilan, ou plutôt, ce que nous aimerions voir continuer s’exprime, et quelques personnes parlent plus que d’autres, peut-être à cause de la mauvaise conscience qui agit.

Je me retrouve face à face avec une sentinelle. Oh, évidemment, elle ne s’est pas présentée comme telle. Je les imaginais toujours derrière un bureau en train de nous surveiller, mais au bout d’un moment, tout de même, (je ne suis pas née de la dernière pluie et il y a comme une expérience qui se forge dans ce milieu), je me suis dit qu’il y avait forcément un relai sur le terrain, quelqu’un qui jouait le rôle qu’on attendait, parfois sans qu’on le lui dise vraiment, un rôle qu’on accepte de remplir, pour être quelqu’un aux yeux des autres, et surtout, aux yeux d’une figure d’autorité ancestrale : celle du vieux papa. On est en partie constitué de cela. Au nom du père, etc… Donc, maintenant que je suis face à la sentinelle, j’arrive mieux à en analyser le profil. Papa gère tout à la maison. Il conduit sa petite affaire. Ça marche plutôt bien. On transforme le besoin esthétique en besoin économique, et hop !, c’est le trésor qui s’accumule. Les voitures sont de plus en plus nombreuses, puis de plus en plus belles. Y a même des motos. Bref, notre sentinelle a envie d’être comme papa, de faire comme papa. Elle exprime son choix. Papa est content. Il prend la sentinelle sous son aile. C’est à ce moment-là, qu’en fait, il l’enferme. Il l’encage. La sentinelle est en formation accélérée. Elle est tellement brillante qu’on lui donne un poste dans la boîte de papa avant même qu’elle ait ses diplômes. D’ailleurs, elle n’en aura bientôt plus besoin, des diplômes, puisque son poste ne sera jamais remis en question. La sentinelle emménage dans son propre logement. Reproduction du modèle. Belles voitures. Belles motos. Les années passent et l’encagement ressurgit. C’est un besoin réel d’autonomie intellectuelle. Et comme on ne peut pas s’insurger contre le réel papa, on transfère et on s’énerve contre le directeur. Enfin, on s’énerve. On se place de telle sorte qu’on soit toujours entendu. On n’est pas d’accord, on le dit. À tel point qu’on se sent supérieur au supérieur. On se sent diriger quelque chose. Et on voit sous nos yeux la faute grave d’un agent. On ne se pose pas la question de la souffrance de l’autre. On se pose en garant.

— Parce qu’en fait, qui est allé raconter tout cela au directeur ? (Sous-entendu : qui est à l’origine de ce conseil de discipline ?).
— C’est moi.

C’est l’aveu.

— Je trouvais ça insupportable.

Et on se raconte à nouveau l’histoire de ce pauvre homme devenu alcoolique. Je suis passée lui parler, depuis. Il a un dessin accroché dans son bureau. À une époque, il dessinait huit heures par jour. C’est vrai que j’ai conscience que je ne fais peut-être pas comme les autres. Je ne suis pas venue lui demander comment s’était passé son passage au conseil de discipline. D’abord, parce que je le savais, et puis, parce que ce n’était pas à lui de dire que nous trouvions scandaleux la situation qu’il avait vécue. Ça se ferait avec le syndicat. Dans les réunions prévues à cet effet. Le jour, où, c’est la loi, le supérieur hiérarchique n’est pas là. Ce n’est tout de même pas si fréquent, mais ça arrive, et en général, les personnes tombent de haut. Ça me rappelle l’ancien temps. La DGA avait accepté un rendez-vous mais le directeur était occupé dans le bureau d’à côté. Alors on avait tout déversé. C’était notre point de vue. On avait fini par faire admettre qu’il faudrait nous prévenir en amont si une nouvelle réduction de personnel était envisagée. On avait calculé en direct. Puisque les décisions définitives sont prises en juin. En mars, du coup, c’est pas mal. On étudie ensemble le plan, on calcule ensemble. Et depuis, les réductions d’effectifs s’étaient stabilisées jusqu’à s’estomper complètement.

La sentinelle n’a déjà plus le même regard. Il n’y a plus cette assurance, cette certitude, d’avoir agi dans le bon sens. Elle voit les autres possibilités qui, aussi, le jour où elle a décidé d’envoyer un mail, étaient présentes. Le miroir est tendu, sans jugement. J’ai juste conclu simplement : tout se serait passé différemment si nous en avions parlé en amont. Là aussi, c’est comme une conviction. La sentinelle agira autrement. Cela prendra peut-être du temps, mais le processus est enclenché.

La maltraitance

Il y a longtemps que je n’étais pas allée à une réunion de service. Certains semblaient presque étonnés de me voir. Il n’y avait pas grand monde. Au fond, je me doutais un peu que les réunions ne concernaient plus que quelques affidés.

Alors, bien sûr, je vous passe les détails d’hygiène : il était en retard, avec, sous le bras, sa collaboratrice attitrée (c’est celle qui s’est autodésignée – Le directeur avait une technique facile, il disait : tant qu’il n’y a personne qui se présente, la place reste vacante et le travail n’est pas fait, alors, au bout de quelques mois, il y avait toujours quelqu’un qui se proposait, et elle, elle était là depuis de nombreuses années). Il nous fait changer de pièce pour avoir plus chaud. Il n’y a que lui qui avait froid.

Il rappelle quelques règles auxquelles il tient absolument. Ne vous adressez pas au DRH directement. Il fait un portrait terrible du gars en question. Ça donne pas envie de lui écrire. Il vaut mieux que tout passe par lui. Je lance tout de même une petite rumeur dans les rangs. Le DRH n’est pas dans la pyramide hiérarchique. Il n’est pas notre supérieur. Il est censé appliquer strictement la loi, et répondre à nos demandes dans la mesure de ses moyens. Les demandes sont individuelles. C’est un droit, que nous avons tous, de s’adresser à lui, et il ne faut pas s’en priver. Certains me répliquent que ça va souvent plus vite quand on passe par le directeur. Oui, quand il a envie. Sinon, ça traîne sur son bureau et vous, vous attendez. D’ailleurs, remarquez ce qu’il vient de dire : certaines requêtes auraient été tout simplement refusées. J’ai demandé à qui, et il n’a pas su répondre. Ce n’est pas parce que c’est un secret d’état, c’est parce que ce n’est pas vrai. Ce type nous balade dès qu’il ouvre la bouche. Il parle de lois très compliquées, de chartes qui circuleraient auxquelles on aurait à se soumettre, d’alinéas dans les contrats d’assurance qui permettent qu’un jour, il refuse ce qu’on lui propose, et l’autre, il nous impose une idée farfelue.

Puis, il reprend des sujets qu’on avait déjà abordés en formation. Les mails professionnels, tout ça. Mais il en rajoute une couche sur notre responsabilité. Il voudrait faire un peu pote avec nous, alors il nous donne quelques combines. Si on veut, par exemple, envoyer quand même des textos. On se dit, c’est la vie, de toute façon. Comment pourrait-on l’empêcher ? Quand on aura besoin, on fera. Mais lui, il prend ça très au sérieux, et c’est comme un effondrement. En public. Avec son petit public. Un public acquis à sa cause. Il parle plus lentement. Pour pouvoir dire quelque chose. Il parle de très loin. Ah ça, oui, ça venait de très loin. Pour finalement dire : je me suis fait attaqué en public.

Il m’est presque apparu tout à coup différent. L’image que j’avais de lui s’est transformée. Ce n’est pas comme s’il m’était devenu sympathique, mais quelque chose de ce qu’il avait créé avait permis cela, une écoute plus attentive. Au fond, on avait peut-être cette chose en commun, un traumatisme, que moi, j’avais en partie réglé, ou dont j’avais en partie pris conscience, et lui, qu’il venait là mettre en scène. C’était l’humiliation qui s’était installée à sa place. Elle avait besoin de s’exprimer. Et lui, à travers elle, nous demandait, finalement, de l’aider. Et je l’ai fait. Ce n’était pas difficile parce qu’il avait tout bien présenté. On se retrouve dans des réunions, à trois, et ils sont toujours deux contre moi. Alors, je lui ai dit : c’est très simple, il faut briser cette situation, y adjoindre une autre personne ou faire en sorte que les décisions soient prisent autrement. Nous associer, par exemple. Bien sûr que je me moquais pas mal de savoir quel genre de décisions il avait à prendre et pourquoi il s’était fait attaqué. C’était la manière de le dire. On pourrait dire ils m’ont fait ça ou ça puis il a dit ça puis le téléphone a sonné et, par chance, tout s’est arrêté. Mais ce n’est pas ce qu’on dit. On dit je me suis fait attaqué en public. Ce sont ces mots qui agissent. Ce sont eux qui témoignent. Ils m’ont interpelée. Il s’est placé à ce niveau hiérarchique parce qu’il avait senti qu’il avait besoin de contrôler une forme de pouvoir. Il va peut-être bientôt comprendre que ce n’est pas le travail qui a produit ces malaises successifs. C’est son inaptitude à accepter lui-même l’élément constitutif de son angoisse qui l’a conduit à participer aux conflits internes qu’il vient nous relater. Oui, il a participé à cette situation, l’a même peut-être désirée pour mettre à nouveau en jeu l’inréglé.

Il m’a remerciée de lui formuler cette solution. Il a cherché quelques excuses économiques qui empêcheraient peut-être de la mettre en application, mais je lui ai dit : vous trouverez toujours des personnes prêtes à aider lorsque ça en vaut la peine. Quelque chose va mieux circuler, à présent. Parce qu’il a fait malgré lui l’aveu de sa faiblesse. Et qu’il n’y avait personne en face qui avait envie de lui faire du mal.

Pour une fois.
Peut-être, une première fois.

Ne plus cesser d’agir que dans la clandestinité

On est toujours un peu impressionné quand on doit se rendre au siège la Direction pour faire part de son petit cas personnel. Déjà, ce ton qui vous dit « oui, oui, passez telle date à telle heure sinon on reporte à dans six mois », ne prenant pas en compte que vous pourriez avoir d’autres projets dans la vie que de venir vous frapper la tête contre les remparts du pouvoir. Alors, on arrive, on vous fouille comme à l’aéroport, on vous pose dans un canapé, on prévient votre interlocuteur et on vous fait attendre devant des petites caméras qui balaient la salle de gauche à droite. C’est important, de vous faire attendre. « On viendra vous chercher », sauf qu’on prétend qu’on aurait oublié, on finit par rappeler, on vous demande de monter sans plus d’informations, vous vous retrouvez dans un long couloir à devoir demander à la première personne qui passe avec des dossiers plein les bras, on vous dira « deuxième bureau à gauche », mais avant cela, c’est l’attente, on reste face aux ascenseurs, et on voit l’organisation de la structure à laquelle on est venu se confronter.

Premier étage : Sous-direction de la communication et des prospectus.
Deuxième étage : Direction du personnel et autres joyeuseries (y compris les salles de réunion).
Troisième étage : Directions diverses et variées, semble-t-il bien plus importantes.
Quatrième étage : Vertige de ne plus même comprendre à quoi servent ces intitulés.
Cinquième étage : Président (marque de fabrique d’un ancien régime).

Sur une télé défilent en continu les informations qu’on balance au public comme preuve d’une activité permanente du vivant : disparition de la petite unetelle, les services de police aux aguets, merveilleuse réussite des plans adoptés toute l’année, quatre photos d’élus sur le terrain avec leur sourire d’été, et tout s’enchaîne aléatoirement. L’esprit ne peut plus analyser. Au bout de quelques minutes, seule l’angoisse règne. Parce qu’on n’a pas le temps de compter, ni même de trier, et il y a bien plus de titres effrayants que de titres rassurants. Tout semble nous échapper. On croît qu’on ne pourra jamais rien faire. C’est l’inaccessibilité révélée. On se demande déjà pourquoi on est venu.

Car c’est cela qui se formule ensuite en pensées. Comment dire en quelques phrases pourquoi on dérange quelqu’un du deuxième étage alors qu’on aurait pu tout aussi bien envoyer un mail à son chef de secteur ? Rappelez-nous, en quelques mots, l’objet de ce rendez-vous ?

Ben, c’est sûr que, déjà, je ne m’attendais pas à ce qu’on soit plus de deux dans la pièce. C’est déroutant. Elle avait l’air de ne rien faire, la « sentinelle » postée juste derrière, de sorte que je ne la voyais ni agir ni réagir, comme dans un bureau d’interrogatoires, mais pourquoi serait-elle restée inactive le temps d’un entretien privé dont la proximité ne pouvait rien autoriser d’autre que d’y joindre un silence pesant et déstabilisant ? J’ai pris l’option de considérer qu’elle n’était pas là, mais comment faire quand un regard ne cesse d’ausculter votre dos pour voir à quel moment il s’effondre ? J’ai posé ma question, et ce fut un bombardement de justifications bien faites sorties de la bouche d’un être humain comme les pop-ups surgissent d’une page WEB. Blablabla, problèmes budgétaires, tout ça n’a rien à voir avec vous, l’État se désengage, blablabla, réductions dans les services, partout pareil, blablabla, ah non, sauf trois, pour qui s’est marqué « investissement remarquable ». Tiens. Et qu’auraient-elles donc pu faire de plus que moi, ces trois-là, qui n’apparaîtrait que mentionné sur une feuille faite pour distribuer ce qui ressemble de plus en plus à des récompenses pour services bien rendus ? Parce que je les connais, ces personnes. Je vois quel genre de postes elles occupent. Des coordinatrices dont on se demande toujours pourquoi elles se sentent supérieures. Il n’y aurait donc pas de problèmes budgétaires pour tout le monde. Je ne sais même pas pourquoi je m’en étonne. Pauvre idiote que je suis de toujours croire que seule la qualité du travail pour lequel on a été engagé paie.

Je fais comme m’ont dit les camarades du syndicat. Je rappelle seulement les faits. Rien à voir avec moi ? Et pourquoi mon supérieur s’est-il à ce point énervé pour une broutille ? Pourquoi j’ai vu défiler des collègues qui, tous, sont venus me dire à quel point ils trouvaient déplacé le positionnement que j’avais adopté ces derniers mois, comme pour juste me signifier qu’une petite garde rapprochée n’allait pas me lâcher, et qu’ils allaient tous, ensemble, et de façon bien coordonnée, mettre en place une phase de mise en boucle des sujets de sorte qu’ils deviennent opérationnels, c’est-à-dire, harcelants ? Je pointe l’anormalité de la situation, le manque de transparence, la non justification que cela génère, et je demande si l’étape suivante est d’aller à l’étage supérieur. Tout à coup, le deuxième étage se met à trembler. J’entends la sentinelle s’affairer sur son ordinateur pour ouvrir un dossier « incident ». Toute demande particulière m’enverrait directement au quatrième étage, subitement trop proche du cinquième. La Directrice m’invite cordialement à prendre un petit café, et dans le couloir, elle murmure fièvreusement :

– Ce que vous proposez est certainement la meilleure solution, mais n’en parlez pas ici, je vous en conjure. Pas dans mon bureau. Je vous laisse analyser la lettre du personnel à la rubrique des mutations, et établir les liens avec quelques-uns de vos collègues qui, comme vous, sont venus pointer quelques problèmes de dysfonctionnement. Vous comprendrez peut-être un peu mieux.

Sa voix avait changé. Elle n’était plus qu’une source d’expressions qu’on aurait empêchées dans tous ces lieux où, partout, on se sentait surveillé. Je connaissais bien la rubrique des mutations. J’y avais vu défiler mon nom à deux reprises. On tentait d’abord à l’intérieur du secteur, et si la situation devenait intenable, on expatriait. « Souhaitons une bonne continuation à notre agent qui tente l’aventure dans une autre structure ». On ne savait rien à ce sujet et je ne voyais plus défiler devant moi que des accès aux sous-sols du bâtiment, des -1, des -2, pour lesquels il fallait un badge, une clé, ou un code. Je me rendais compte subitement que rien n’était renseigné sur le panneau du rez-de-chaussée de ce qui s’y passait vraiment alors qu’il aurait suffi d’y mettre cuisines ou livraisons pour que personne ne s’interroge. Partout, il fallait insérer ce genre de petit détail pour provoquer peu à peu une inquiétude croissante. On aurait tout aussi peur de grimper que de plonger. C’était là, à cet étage, que se jouait le courage d’y faire face. « Sans sucre, s’il vous plaît ». Et devant la machine expulsant ces liquides nauséabonds, on se forçait à parler à haute voix, des vacances, des enfants, de tout sauf des sujets qui nous préoccupaient vraiment.

Le retour au bureau fut cordial. La voix de mon interlocutrice avait repris son ton inexpressif de robot formaté. La sentinelle envoyait déjà son rapport. Les agents ont quitté l’espace de consultation durant sept minutes. Ils se sont à nouveau installés pour conclure la conversation. La Directrice a bien donné le numéro du standard où tous les appels sont filtrés et n’aboutissent qu’à « votre interlocuteur est en réunion ». RAS d’autre de plus significatif si ce n’est que l’agent-demandeur sera sous notre surveillance le temps d’évaluer ses moyens d’action.

La Directrice m’a raccompagnée jusqu’aux ascenseurs.
Son regard était presque compatissant.
Elle a fini par un drôle de salut, me tendant une main fraternelle :

– Bon courage.

Je sais désormais ce qu’il me reste à faire.

Des larmes que nous avons, plein les mots

Le système qui place en une seule personne tant de responsabilités n’est peut-être pas le meilleur que nous ayons inventé. Je le vois bien dans les différents services que j’ai fréquentés. On nous apprend à l’admettre dès la première minute que nous passons à travailler : il y a des catégories, et ça ne se discute pas.

La catégorie A est tellement préoccupée qu’elle crée des sujets fondamentaux, constitutifs. Rien d’autre ne peut exister. On confond tout. Les dates, les fonctions, les raisons d’être. La réalité et la fiction. Il faudrait faire la police. À chaque échelon. Partout, il y aurait des criminels en action. L’inquiétude se diffuse. D’où quelques regards suspicieux. L’acharnement à établir des listes de coupables.

La tension est si forte que nous avons peur, chaque matin, de trouver un cadavre. L’image devient obsédante. Nous voulons la voir disparaître.

Quand je n’en peux plus de cette tension, j’appelle Patrick. Il m’aide, juste par la conversation, à sortir de mon bureau sans fenêtre. Cela me fait beaucoup de bien et me rappelle une belle période. Même si elle a été courte. Elle a existé. Ça aussi, c’est la réalité. Je reviens sur les thèmes dont Patrick parlait si souvent. La fraternisation des oppresseurs contre les opprimés. Et je vois bien ce que j’apporte. Une « fraternisation des opprimés avec les oppresseurs ». Il a beaucoup de mal à l’admettre. Qu’il n’y aurait pas de poulaillers où l’on pondrait des dictateurs. Nous les avons désirés, formés, portés.

— C’est pourtant bien toi la victime, dans l’histoire, Martine.

Oui, c’est moi. Il criait. Son visage était écarlate. Mais la menace qu’il brandissait n’était pas un couteau. Je n’étais pas en danger de mort. Ce qu’il m’obligeait à faire dans cette situation, c’était à me rebeller. À dire non. Tout l’avait mis dans une position insupportable. Trop de responsabilités. Trop d’incompétence. À sentir une agressivité remonter. Son attitude me disait que je serais peut-être la seule à pouvoir faire que tout s’arrête, mais je l’ai refusé. Parce que c’était totalement déplacé. J’ai quand-même crié, mais c’était déplacé, aussi. Et puis, je me suis soumise. À cette communauté presque invisible, parce qu’elle est silencieuse. De ceux qui ne veulent pas agir. Parce que la place de victime est plus confortable. Nous n’aurions plus qu’à relater nos souffrances. Comme un poème s’articulant. Des larmes que nous avons, plein les mots.

— Tu as pleuré ?

Oh oui, beaucoup. Parce que je ne comprenais pas. Parce que j’avais oublié. Que je m’étais laissé faire. Que le tabou était si bien installé qu’il en rappelait d’autres, là, dans le corps, empêchant de crier. C’est si fort, un tabou. C’est véritablement le non-dit. Il n’existe pas. Réellement. On ne peut rien en faire.

— Alors, quoi, il ne faudrait jamais se taire ?

C’est cela. Il faudrait dire, continument. Mais à qui ? Qui entendrait que nous sommes en partie complices de tout ce qui nous oppresse ? Que nous sommes le fruit d’une indéchiffrable complexité ? Que cela ne se résume pas à une catégorie contre une autre. À un conflit de personnes. Une lutte de pouvoir. Un seul homme.

— Tu as changé, Martine.

Oui, j’ai changé. Avant, j’écrivais pour dicter ma loi, faire des reproches, m’insurger. Je jouais mon propre rôle. Celui que je m’étais assigné. Puis j’ai vu que d’autres écrivaient. Puis je me suis relue. Puis je me suis dit que j’allais participer à ma manière, avec mon sujet à moi, avec ma matière, dans le style de ce que j’ai aimé lire. Puis je me suis rappelé que je m’étais fait agresser. C’était très douloureux de s’en souvenir, mais c’est passé. Maintenant je suis une victime en voie de reconstruction. Ce n’est plus à l’agresseur que je pense, mais à moi, à mon bien-être, à tout l’amour que j’ai su conserver.

— Nous pourrions nous revoir, qu’en penses-tu ?

Je n’en pense que du bien.

Comme un tic, comme un toc

Pensiez-vous vraiment que je ne vous lirais jamais ? Que je ne saurais pas, un jour, que vous parlez dans mon dos ? Que depuis que je suis revenue, ou que j’ai été redéplacée, je n’entends pas vos « T’as r’vu la secrétaire ? », aimable comme une porte de prison, dont la Direction se méfie comme de la peste, qui s’est mis tout le monde à dos, déjà, « Ah la la, elle va pas faire long feu, celle-là ».

C’est vrai. J’ai une voix grave. Je ne souris pas tous les jours.
Et puis, au bout de quelques heures, enfermée dans un placard sans fenêtre éclairé par des néons, collée à un ordinateur, j’ai atrocement mal à la tête.

Ah oui, aussi, mais ça, vous ne le savez pas parce que je n’en parle à personne : il y a quelques années, j’ai été agressée.
Plusieurs fois.
Oh, peu importe les faits qui intéresseraient uniquement les journalistes de la Gazette des secrétaires.
Juste le mot agression devrait suffire à tout comprendre.
Et vous savez quoi ? Une agression, ça crée un traumatisme qui s’installe, immédiatement. Et comme la naissance, la conscience tente de tout oublier, immédiatement. Tellement c’est douloureux.

Parce que l’agression, elle a un temps fini, mais le traumatisme, lui, il est là. Presque tous les jours. Comme un rappel à l’ordre. Plus fort que tout. Dans le corps, comme un tic, comme un toc, à la moindre voix qui se lève, à la moindre inconstance. Tout revient, les tremblements, les pensées qui affluent dans la tête, désordonnées, des cris étouffées, là, partout, une sensation d’étouffement, et oui, un agacement, aussi, parce que ce sont des questions qui se posent constamment : Pourquoi moi ? Et avait-il vraiment besoin d’agresser quelqu’un ?

Comme je vous dis, j’avais d’abord oublié, puis le patron est entré comme une furie dans mon placard sans fenêtre. Je le sais, maintenant, il était venu déverser son incompétence sur un bouc émissaire, mais sur le moment, j’ai paniqué. Moi aussi, j’ai crié. C’était insupportable.
Les tremblements. La sensation d’étouffement.
Vous connaissez la suite.

J’ai pris un peu de recul pendant mon congé.
C’est vrai, j’ai surréagi, comme disent les anglo-saxons.
Et j’ai tout délié pour revenir au traumatisme originel.
À l’agression.

Des événements de la vie qu’on n’a pas envie de raconter.

D’autres en vivent très certainement de bien pires. Il n’est pas nécessaire d’évaluer les souffrances. C’est comme ça. Ça m’est arrivé, et pas à vous, ni à d’autres, parce que je suis la seule à l’avoir subi, ces jours-là. Trop de fois. Avant de dire basta. On en rirait. « Combien de fois ? ». Oui, vous en ririez. Je vous entends d’ici. Mouhahaha. Mais vous savez, les jours, ils ne comptaient plus. L’agression était toujours la même. La précédente était oubliée.

Parce que je n’y croyais pas.
Déjà.
Que ça puisse arriver.

Alors, que ça puisse recommencer.
Je ne l’avais même pas pensé.

Chassez le criminel, il revient au galop

J’étais partie.

En fait, je n’en pouvais plus. De cette administration.
Et je l’ai dit. Peut-être trop souvent. Ou peut-être trop fort.
Ou peut-être pas à la bonne personne.

J’ai d’abord pensé que ce n’était pas à moi de partir.
Que tout ce qu’il y avait ici, c’était une partie de ma vie.
Et puis, j’ai visionné à nouveau les nombreux cauchemars.
Je me suis souvenue des angoisses avant d’aller travailler.
Des angoisses pendant.
Des questions ensuite, sur le chemin, alors que personne, dans le métro, ne pouvait comprendre pourquoi je mordillais un stylo, pourquoi je baissais la tête, pourquoi je maigrissais, pourquoi je pleurais.

Il y a toujours une goutte d’eau qui fait déborder le vase.
C’était en réunion de service.
Il s’est mis à me gueuler dessus comme à la Gestapo.
“TAISEZ-VOUS ! TAISEZ-VOUS !”
En public.

C’est sûr, qu’après ça, j’ai croisé quelques collègues dans les couloirs qui m’ont dit “Rholala, qu’est-ce que t’as pris ! Mais au moins, c’est clair, le harcèlement est manifeste. On est tous avec toi”. Moi, j’étais un peu sonnée. Y a eu encore quelques nuits d’insomnies. Et des courbatures. Comme si on m’avait frappée. Le dos, comme un hématome géant. Arrêt maladie. Dépression. Demande de mutation, vite acceptée.

Je suis arrivée dans un service, sur un autre site, qui n’avait rien à voir. Des gens souriants. Des gens serviables. Des collègues qui m’ont accueillie avec beaucoup de sympathie, et qui ont tous de très belles convictions, des sortes de sujets de prédilection, dont ils discutent à longueur de journée.

Michel, c’est l’éducation. Maurice, le nucléaire, les industries de l’automobile, tout ce qu’il trouve indécemment surpuissant. Il débat souvent avec Patrick à propos de la débâcle industrielle, et Patrick l’emmène toujours sur le sujet du syndicalisme et des contre pouvoirs. Il m’amuse, Patrick, quand il parle de la “fraternisation des oppresseurs contre les opprimés”. J’ai l’impression d’être l’exemple qu’il cherchait de toutes ces victimes de complots. Je crois que c’est le plus féministe. Il dit qu’il y a encore 21% d’écart de salaire entre les hommes et les femmes. Je le laisse dire, parce que je le trouve très gentil, mais quand il saura les écarts de salaire que j’ai vus en ouvrant par erreur des bulletins de paie qui ne m’étaient pas destinés, il risque d’en faire une apoplexie. Djem, comme on l’appelle, parce que personne n’arrive à dire son prénom bizarre sans en écorcher une partie, c’est le plus bavard. Il devient fou avec l’histoire des migrants. Il parle du droit à l’IVG remis en cause je ne sais plus où en Europe, de cette vision conservatrice de la famille qui s’installe un peu partout. Maud aussi, finalement, est assez bavarde, mais elle n’est pas toujours là. Elle est plus sur le terrain. Elle parle de la pauvreté, de l’exclusion. C’est elle qui nous ramène des nouvelles de ce qu’elle appelle la “boucherie sociale”. Paule, assez discrète, mais très à l’écoute, finit souvent en soupirant et en touillant son café : “Et pendant ce temps-là, les patrons s’enrichissent…”.

Au début, j’écoutais, seulement, parce que je n’étais tout simplement plus habituée à parler pendant le travail. Tous ces sujets m’impressionnaient beaucoup. Enfin, pas vraiment les sujets, mais la façon que chacun avait d’avoir une opinion clairement engagée, avec des chiffres, avec des dates, avec des exemples dans les pays les plus lointains du monde. Je me disais que j’étais peut-être un peu égocentrée à ne m’occuper que de mon petit quotidien, le syndic de copropriété, les saletés dans la rue et, évidemment, mes petites anecdotes croustillantes sur l’administration fasciste que je venais de fuir. Et puis, finalement, je me suis rendue compte que c’était ça, mon sujet. J’ai commencé à expliquer comment ça se passait dans mon ancien service, et ils m’ont tous écoutée avec beaucoup d’attention. Patrick m’a dit qu’il ne fallait pas laisser faire tout ça. Que, déjà, il fallait que je porte plainte pour harcèlement et que, ensuite, je vienne aux réunions syndicales où, apparemment, je pourrais exposer quelques faits fort utiles aux personnes qui nous représentent dans les hautes sphères.

J’ai bien cru que j’étais arrivée au paradis.
Qu’il y avait finalement une justice dans ce bas monde.
Je crois que j’avais repris presque six kilos.
Mais, voilà, le conte de fée est terminée.

J’ai reçu un coup de fil de la DRH. Une adorable personne m’a expliqué, un peu gênée, qu’il allait être nommé à la direction du site qui m’avait recueillie et que, “vous comprenez”, — oui oui, bien-sûr, tout le monde avait très clairement entendu que j’avais subi une situation anormale, “illégale”, oui oui, “illégale” —, mais, “vous comprenez, il y a des cas difficiles à gérer”, ce n’est pas elle qui décidait, il allait être nommé et moi je serais renvoyée dans mon service d’origine, sur l’autre site.

Avec les collègues qui, quand je leur demande s’ils seraient prêts à témoigner, ont tout de suite quelque chose de plus urgent à faire.

Je me suis installée dans un nouveau bureau, à l’écart, et je pense à Michel, Maurice, Patrick, Djem, Maud et Paule. Je les plains, mais je me rassure en me disant qu’au moins, grâce à moi, ils seront avertis.

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Des milliers dans nos cœurs

C’est nouveau, il faut maintenant que je réponde à des messages reçus sur mon adresse électronique personnelle, que j’utilise mon téléphone personnel pour organiser ma vie professionnelle, que je vienne à des réunions en dehors de mon temps de travail, bref, que je donne un peu plus encore alors que je suis déjà au taquet toute l’année.

Les réformes en tout genre m’ont obligé à acheter un ordinateur. En trois mois, il n’y a plus rien qui marche parce que ce n’est plus à jour. Alors, je ne suis pas du genre syndiquée, mais avant de “renouveler mon matériel informatique”, j’ai calculé.

Oui, depuis quelques années déjà, je suis obligée de calculer, de calculer, de recalculer, et finalement d’admettre que je vais devoir faire des choix, parce que, voilà, je n’ai bientôt plus les moyens de vivre, et je remarque peu à peu que la case “dépenses” gonfle, alors que pour la case “recettes”, j’ai juste besoin d’un copié/collé (j’ai fait une formation).

Augmentation ? Refusée.
Changement d’échelon ? Refusé.
Progression de carrière ? Mouhahaha.
Motif des refus et des rires ? Économique.

L’économie ? C’est ce, justement, à quoi je participe en payant chaque année de plus en plus cher ?
Jamais l’économie se souvient qu’elle doit remplir un peu les caisses de ceux qui consomment ?
Ou bien il y aurait bientôt ceux qui consomment et ceux qui ne consomment pas ?
Ou qui consomment de moins en moins ?
Ou qui ne consomment plus ?

L’abonnement mensuel pour les transports dits publics a augmenté discrètement de quelques euros. La baguette, le café, quelques centimes. Les énergies diverses et variées, on ne sait pas trop parce que le contrat, le nom, les taux de je ne sais quoi, tout change tous les deux mois. La moindre fringue est maintenant à trois chiffres et ça dure deux lavages ou trois balades. Faut manger bio, sinon, on s’empoisonne. Plus de disques neufs. Plus de livres neufs. Je suis passée des retraits à 40 EUR aux retraits à 20 EUR. Plus de restos. Des pâtes sans goût. Plus qu’un repas par jour. Bientôt comme les mendiants que je croise à longueur de journées, tellement désespérés (un à chaque station, un à chaque coin de rue, des dizaines dans les gares, des milliers dans nos cœurs) qu’ils en deviennent agressifs. Si je ne leur donne rien, c’est moi qu’ils accusent en me rappelant que je dors tous les soirs dans un lit, et je rentre la faim et la culpabilité au ventre.

Épargne : 0,75% sur une année.
Et mon salaire qui n’a pas changé depuis plus de dix ans.

Alors, vous savez quoi ?
En dehors de mes heures de travail, il ne faudra plus compter sur moi.
Et au moindre rhume, je me ferai arrêter.

Comme une pluie torrentielle de cauchemars

Je me suis toujours donnée entièrement à mon travail.

Sans lui, je ne serais sans doute rien. Il y a encore quelque temps, je pensais encore qu’il m’avait tout apporté. C’était comme si on m’avait donné le droit de mieux exister. J’étais prête, autant d’années que la loi me le permettrait, à repousser le jour où je saluerai tous mes collègues une ultime fois, mais depuis peu, je ne sais pas trop pourquoi, je fatigue. Je sens comme une menace qui se rapproche. J’entends qu’on parle dans les couloirs, qu’on entre sans prévenir, qu’on se moque lorsqu’on s’adresse à moi, qu’on ne me répond plus qu’avec des énigmes de plus en plus complexes à déchiffrer.

Il y a sans doute plus grand malheur que le mien, mais chaque nuit, dans ma tête, mon esprit s’emballe et se laisse envahir comme si une pluie torrentielle de cauchemars tentait de l’emporter. Je ne dors plus. J’arrive quand j’ai réussi à sortir de chez moi, alors, forcément, je rentre tard, car je dois finir ce que l’on me demande de faire. Enfin, je crois. J’ai l’impression qu’on me demande de tout faire. Je ne sais pas ce qui a changé. Tout devient de plus en plus difficile à comprendre, à atteindre, à supporter.

Je ne demande pas que l’on me plaigne.
Juste un peu de calme.
Un peu de temps.
Pour essayer de comprendre.
Pour me reposer, aussi.

Le pot aux roses

J’ai beau vouloir faire de mon mieux pour que le système fonctionne à merveille, il y a toujours quelqu’un pour me mettre les bâtons dans les roues. Depuis maintenant deux ans, je tente d’établir une procédure claire qu’il suffit de suivre à la lettre pour que tout soit parfait. Les cahiers de présences sont déposés dans vos casiers chaque veille de chaque jour où vous venez travailler. Il suffit de les remplir et de les remettre à leur place lorsque vous avez fini votre journée. Je les récupère le lendemain et, — c’est la première chose que je fais en arrivant —, je les classe par ordre alphabétique et je reporte sur un ordinateur l’intégralité des données que j’y trouve. Seulement, voyez-vous, TOUT LE MONDE NE REMPLIT PAS SON CAHIER DE PRÉSENCES, alors, j’ai été obligée, pour m’y retrouver, d’établir la liste des responsables de formation qui ne remplissent pas ce devoir élémentaire qui aide l’administration à rendre plus lisible le temps d’occupation des espaces, à évaluer des taux essentiels pour le calcul de l’assiduité, gage de réussite de notre projet commun et, — vous pourrez aisément comprendre la nécessité de cette procédure dans le cadre d’un service rendu au public avec de l’argent public —, à faire toute la transparence sur votre réel temps de présence parmi nous, surtout pour les vacataires qui, je le rappelle, ne sont payés que lorsque qu’ils travaillent EFFECTIVEMENT, avec de réels apprentis et de réels horaires.

Depuis janvier 2016, je vous informe que j’ai établi un code couleur très précis que j’applique avec une armée de fidèles stabilos.
– Orange, lorsque le cahier est correctement rempli.
– Rose, lorsqu’il n’est pas rempli.
– Vert, lorsqu’il y a quelque chose que je ne comprends pas.
Pour ce dernier cas, je vous adresse conjointement une question à laquelle je vous demande de répondre dans les meilleurs délais.

Certains d’entre vous ont déjà, depuis le début de l’année, réussi à constituer un véritable bouquet de roses.

Je ne suis pas habilitée à vous faire part des conséquences de cette faute que je m’acharne à chaque réunion de Direction à faire considérer comme aussi grave que de ne pas fermer le volet supérieur de la photocopieuse, et je laisse naturellement la Direction prendre les décisions qui s’imposent.

J’ai juste deux questions que j’aimerais adresser à l’assemblée :

QUI S’AMUSE À REMPLIR CERTAINES CASES VIDES AVEC UN STABILO BLEU ?
QUI TENTE DE DÉTOURNER LE SYSTÈME ?

Soyez certains que je serai suffisamment attentive pour découvrir le pot aux roses.